JEAN RACINE –
ATHALIE – 1691
Jean Racine est un mentaliste spiritualiste. Il croit en la spiritualité
mentale de l’homme, en sa force créatrice et libératrice quand cette
spiritualité mentale est dirigée vers un objectif émancipateur qui dépasse
l’échelle humaine de qui porte cette spiritualité, et c’est ce dépassement
qu’il appelle dieu, c’est cette spiritualité mentale humaine qui dépasse les
limites matérielles de l’individu et même de l’espèce qui font que l’homme peut
directement matérialiser les forces de cette spiritualité mentale qui par
là-même en devient divine. L’important ce n’est pas que Dieu existe mais que
dans ma spiritualité mentale je saisisse ce dépassement, cette dimension
supérieure pour que dieu se réalise en moi et par moi et que je devienne son
agent, son messager, son soldat même, voire son guerrier.
Vous avez dans cette problématique tout ce que l’on appelle le pari de
Pascal. Que vous croyez ou non en dieu, il vous suffit de pratiquer les gestes
et les paroles de la spiritualité mentale du dépassement de vos limites
matérielles pour que dieu s’installe en vous et que vous deveniez sa création.
Dieu dans la coutume de votre vie quotidienne devient alors votre seconde
nature et cette seconde nature divine inspire, sous-tend et renforce la coutume
de votre vie quotidienne. A force de prier le Seigneur, à force de remercier
Dieu, ce Seigneur et ce Dieu prennent vie en vous.
Athalie est l’histoire d’un épisode qui correspond totalement à cet
engagement janséniste de Racine. Athalie, reine de Judée d’origine sumérienne
et pratiquant la religion de Baal a épousé le roi de Judée, juif bien sûr. Un
jour son dieu lui a inspiré le besoin de purifier son environnement et donc
d’exterminer tous les descendants de David dans sa famille, en premier lieu son
mari, le père de ses enfants et ensuite tous ses enfants plus les oncles, les
neveux, les tantes, les nièces et les cousins et cousines au point qu’il ne
restait plus qu’elle dans cette famille royale de Judée. Un peu de brutalité
guerrière tient le peuple juif en respect et soumet tous les autres à un
esclavage sans merci. Elle respecte cependant le temple de David et Salomon, le
grand prêtre de ce temple et les Lévites qui le servent. Ce qu’elle ignore
c’est que le fils le plus jeune de son mari assassiné a survécu à ses blessures
et a été enlevé par sa nourrice qui l’a remis au temple.
Cet enfant n’apprend la vérité comme tous les autres autour du grand
prêtre, de son épouse et de la nourrice, que quand Athalie perturbée par un
rêve qui lui a révélé le danger qu’un enfant lui faisait courir et après avoir
reconnu cet enfant dans ce fils d’elle qui a survécu sans qu’elle le sache,
exige qu’on lui remette l’enfant pour simplement l’exterminer, dans un
raffinement qu’on peut imaginer. L’enfant est alors couronné et cela crée un
renversement car les rois des tribus d’Israël se rebellent alors et soutiennent
le nouveau roi. La reine Athalie a été attirée dans le temple par sa cupidité,
sa stupidité aussi, et le piège se referme et elle finira exécutée.
Racine utilise cet épisode biblique pour renouer la descendance de David
sans laquelle il n’y a pas de Jésus, et ainsi l’exprime le Juif Abner qui sert
Athalie comme chef de ses armées :
« Ce
roi fils de David, où le chercherons-nous?
Le ciel même peut-il
réparer les ruines
De cet arbre séché
jusque dans ses racines? » (Acte I, Scène 1)
Joas, ce fils qui a survécu au massacre, est alors le lien nécessaire entre
David et Jésus. Le récit qui affirme que dieu seul gouverne au destin des
hommes et que ses desseins sont impénétrables devient alors la preuve fondée
dans la foi, la conviction qui n’a rien de rationnelle mais tout de
surnaturelle, que Jésus est bien le descendant de David par la décision de dieu
lui-même. Dieu a choisi la lignée ininterrompue de David, et sauvée en cela par
Joas, pour investir son fils et sa mission.
Mais Bacine est au courant des trois cultures qui s’affrontent et derrière
les trois religions qui s’affrontent aussi. D’une part la religion de Baal,
sumérienne ou babylonienne d’Athalie. D’autre par la religion juive de Joas et
Joad, le grand prêtre, des Lévites et des Juifs des douze tribus. Enfin la
religion de Nabal, le conseiller, comprenez l’esclave personnel, de Mathan, ce
juif qui est devenu le prêtre du temple de Baal auprès d’Athalie. Nabal se
définit ainsi :
« Pour moi, vous le savez, descendu d'Ismaël,
Je ne sers ni Baal, ni le Dieu
d'Israël. » (Acte III, Scène 3)
Cette religion est celle d’Ismaël, le fils qu’Abraham a
eu de son esclave arabe Hagar, un fils en rien né de l’amour mais seulement de
la dépendance. Ce fils Ismaël est bien sûr l’ancêtre de tous les Arabes qui au
7ème siècle développent à partir de cet héritage l’Islam et Le Coran
sous la maîtrise de Mahomet. Ces trois cultures : celle des Zoroastrien
descendus du plateau iranien et qui vont devenir les Indo-Européens est ici
représentée par Baal et Athalie ; celle des Arabes qui deviendra l’Islam
est représentée par Nabal, un esclave lui-même ; et enfin la religion
Juive représentée par Joad et Joas. On remarquera que la religion de Baal
disparaîtra et que beaucoup plus tard les Indo-Européens en premier lieu
développeront à partir de la religion juive la troisième (deuxième
chronologiquement) religion à base sémite, la religion chrétienne qui sera
aussi vue comme une trahison par les Juifs du Temple. On voit alors que le
message de Jean Racine est certes que Joas sauvé par le grand prêtre du temple
de Salomon relie la chaine qui permet à Jésus de descendre de David, mais aussi
ce grand prêtre contient en lui ce qui causera le supplice de Jésus, ainsi
exprimé par Joas confronté à Athalie :
« JOAS : Vous ne le priez
point. [mon dieu]
ATHALIE : Vous le pourrez prier.
JOAS : Je verrais cependant en
invoquer un autre.
ATHALIE : J’ai mon Dieu que je
sers ; vous servirez le vôtre.
Ce sont deux puissants dieux.
JOAS : Il faut craindre le
mien ;
Lui seul est Dieu, madame, et le vôtre
n’est rien. » (Acte II, Scène 6)
Quand cela est dit, tout est dit. Le Dieu des Juifs seul
est dieu et donc le Dieu de Jésus, qui est Juif mais non orthodoxe et non soumis
aux grands prêtres du Temple de Jérusalem, ne saurait être quoi que ce soit, ne
saurait être que rien. Il n’y a pas à frémir devant cet antisémitisme hébraïque
de Jean Racine. L’antisémitisme était monnaie courante à l’époque et d’ailleurs
pogromes et ghettos quotidiens aux mains des Chrétiens.
Cette pièce cependant est presque devenu marginale à
cause de ce conflit d’intérêts avec le monde moderne qui condamne aujourd’hui
l’antisémitisme sans voir que les Arabes étant des Sémites comme les Juifs,
tout anti-islamisme ou anti-arabisme sont nécessairement des antisémitismes, ce
qui d’ailleurs explique pourquoi en France depuis quelques temps et surtout
depuis le 13 novembre tant les agressions anti-juives que les agressions
anti-islamistes et anti-arabes (au sens général d’anti-musulmanes) suivent une
courbe ascendante sans précédent dans ce pays. Ce qui explique que l’émigration
juive de la France vers Israël est maximum dans le monde et la
« migration » de combattants jihadistes tant hommes que femmes de la
France vers l’Etat Islamique est aussi maximum dans le monde, avec peut-être la
Belgique en annexe ou en banlieue de la France.
Jouer une telle pièce est jouer avec le feu, mais ne pas
la jouer est une censure culturelle. Surtout qu’en plus le style de Jean
Racine, sa langue poétique sont probablement à leur plus haut niveau dans cette
pièce tardive, d’autant plus tardive qu’elle est son testament.
Dr Jacques COULARDEAU
# posted by Dr. Jacques COULARDEAU @ 2:28 PM