L’OPERA DE PEKIN – XU
CHENGBEI – PEKING OPERA, THE PERFORMANCE
BEHIND THE PAINTED FACES – 2010
Le sujet est fascinant mais le fait qu’il soit traduit en français à partir
de la traduction en anglais et non à partir du texte original en chinois, fait
que des tournures anglaises se glissent ici et là, voire même des erreurs de
traduction. Et pourtant c’est un petit livre introductif capital pour cet art
mal connu en Occident, mais les orthographes variables des mots chinois, jamais
donnés dans leur caractères chinois eux-mêmes, fait que l’on a quelque
difficulté à suivre le propos, par exemple le personnage générique masculin
est-il « shen » ou « sheng » ?
Le livre insiste sur la tradition. Forme théâtrale qui s’est développée en
premier dans les provinces et qui ensuite est montée à Pékin et s’y est
installée, le livre cependant n’est pas assez clair sur une tradition qui a
nécessairement plus de deux siècles d’existence car elle plonge ses racines
dans des pratiques théâtrales beaucoup plus anciennes et pratiquées dans les
foires, les marchés et les temples (que l’on imagine bouddhiste car ce n’est
pas précisé) bien avant de se retrouver dans des salons de thé comme
accompagnement théâtral des discussions et des dégustations, et avant même de
devenir de vrais spectacles théâtraux.
Il serait aussi bon de savoir quels furent les contextes sociaux et
culturels qui ont produit cette forme artistique. Quelques éléments sont donnés
avec le Roi des Singes et « Le Pèlerinage vers l’Ouest » de Wu Cheng'en du XVIe siècle. Mais
une telle forme littéraire épique a nécessairement des racines dans des
traditions orales anciennes, beaucoup plus anciennes.
Mais le livre insiste sur
le caractère familial de ce théâtre traditionnel, chaque troupe étant formée
autour d’un grand acteur et maître et ce maître puisant dans sa famille des
membres supplémentaires qui se consacrent au théâtre dès l’enfance. Le livre
insiste aussi sur le fait qu’un acteur ne peut devenir un grand que dans la
mesure où il commence sa formation très tôt, bien avant l’adolescence, et qu’il
se spécialise très vite dans l’un des quatre grands rôles de ce théâtre, chaque
grand rôle générique ayant des sous-catégories : « sheng »
(homme adulte), « dan » (femme), « jing » (visage peint) et
« chou » (bouffon). Il est bon de noter que tous les rôles peuvent
être tenus par des hommes et que la promotion des femmes est récente, tout
comme l’interdiction de la vente des enfants aux compagnies théâtrales par
leurs parents.
Le livre insiste sur la
difficulté de survie de ce théâtre dans le monde actuel, dans sa forme de
théâtre vivant du moins. Le livre note en passant que le CD et le DVD ont transformé
la présence de cette forme artistique dans la société, y compris internationale,
sans compter la télévision, le cinéma et la radio en ordre anti-chronologique.
Il serait bon d’insister un peu sur ce fait.
Traditionnellement ce
théâtre associe quatre formes d’art : le chant, le récitatif, le mime et
le combat. On notera que le récitatif est plus important que le chant quand les
deux formes sont présentes. Les pièces mettent l’accent sur une des quatre
formes, rarement toutes. Alors que le décor et les accessoires sont très peu
nombreux sur scène, le maquillage, les costumes et la codification de la
gestuelle sont des formes très élaborées, sans parler bien sûr du chant et du
récitatif, donc du langage mis en musique, qui eux aussi sont fortement
codifiés.
La révolution culturelle
a eu un impact lourd sur cette forme artistique en interdisant les pièces
traditionnelles et en mettant en avant un répertoire
« révolutionnaire » de paysans, d’ouvriers et de soldats de l’Armée
Populaire autour d’événements de la révolution maoïste, et ce sous la direction
de la dernière épouse, puis veuve de Mao Zedong de 1966 à 1976, période qui
finira avec l’élimination d e la « vande des quatre » non mentionnée
dans le livre.
Le livre signale le renouveau
de cet art mais n’insiste pas suffisamment sur justement ce renouveau tant dans
la formation que dans les formes et les sujets et préfère insister sur le
public vieillissant et la nostalgie en particulier pour les pièces
révolutionnaires de la révolution culturelle.
Un bon livre d’initiation
pour ceux qui ne connaissent que peu ou pas cette forme théâtrale.
Dr Jacques COULARDEAU
# posted by Dr. Jacques COULARDEAU @ 1:40 AM