JEAN-MARIE
BESSET – LES GRECS – THÉÂTRE DU PETIT MONTPARNASSE – 2006
Quatre personnages. Trois hommes et une femme. Un couple hétéro
marié et un couple gay non marié, celui-ci se composant d’un vieil ami de la
femme mariée et de son ami algérien sans papiers. Les circonstances font que l’homme
marié, père de deux fils, se trouve pris dans un engrenage qui l’amène à se
laisser aller avec le vieil ami de sa femme pendant que sa femme se laisse
aller avec l’ami algérien de son vieil ami avant que les deux couples officiels
ne se retrouvent après cette double aventure, interrompue pour l’Algérien par
le plus jeune des deux fils qui vient se blottir entre les deux amants, la mère
et l’Algérien, choquant celui-ci comme ce n’est pas possible.
Il ya chez les trois Européens un complexe de supériorité
qui se niche dans leur culture antique grecque sans qu’ils voient que c’est d’une
part un prétexte, un paravent pour ne pas parler de choses personnelles, et en
même temps une façon de ne parler que de ces affaires personnelles par
intermédiaire de guerriers et de leurs femmes. Ceux qui ne sont pas gay parlent
des personnages gay de l’Iliade ou de l’Odyssée, ce qui les titillent
intimement mais de la seule façon qui puisse être : de façon clandestine. Et
ce n’est pas mieux avec les pauvres Hélène et Andromaque, sans parler d’Astyanax
dans les coulisses, pour ceux ou celles qui sont hétéros et ne peuvent parler
en public de leurs désirs que par transfert et intermédiaires.
Cela rend la première moitié de la pièce particulièrement
lassante d’érudition inutile puisque ce ne sont que des détails qui sont cités,
des bribes de textes et jamais la moindre réflexion un peu plus construite. Ce
sont des balivernes et même des impostures de gens éduqués qui n’ont rien à
dire de sérieux car ils n’ont que des détails et la culture est ce qui reste
quand ces détails ont été oubliés. Ce sont ces gens-là qui votent pour les
présidents, qu’ils soient en place ou qu’ils soient alternatifs. C’est du
vernis ou de la peinture qui n’a aucun sens réel pour eux, et encore moins pour
nous. C’est comme une messe en latin, enfin ici en grec.
Quand ils commencent enfin à parler de choses réelles pour
eux, cela les mène immanquablement au charnel et infailliblement à l’orientation
qui n’est pas majoritaire, qu’elle soit celle de celui qui parle ou non. D’une
façon ou d’une autre chacun désire celui qui est de l’autre côté de la ligne de
partage. Pour la femme en plus elle en traverse deux : elle en pince pour
l’Algérien gay. Vous savez ce que l’on dit : « Certains de mes
meilleurs amis sont des Algériens. » Ce sont aussi des Noirs, des Russes,
des Chinois, et même bientôt des Martiens.
Mais tout cela n’est qu’aventure et occasion spontanée et
temporaire. Les deux couples se retrouvent avec un peu de bruit et pas mal de
fureur et la touche finale est l’appel des deux fils qui ont été pris par leurs
grands-parents très tôt ce dimanche matin, concernant leur désir d’aller au
cinéma que leurs parents bloquent en prétextant le film de Charlie Chaplin dont
le père a acheté le DVD. Pensez un peu, « Les feux de la rampe ».
Cette touche finale comme produit un changement dans ce couple, et pour le
public elle impose une vision négative pour le couple gay déjà parti. Jamais un
couple gay ne pourra avoir deux enfants qui soient leurs enfants, et la
jouissance qui va avec.
On voit le vrai débat derrière qui n’est même pas
effleuré. Un couple gay n’est en rien équivalent, voire égal à un couple hétéro
parce qu’ils n’auront jamais d’enfants à eux.
Jean-Marie Besset est un étrange auteur. Il touche des
sujets qui pourraient être scabreux mais qui restent dans la normalité de l’exception
acceptable pour la majorité qui de toute façon sera toujours supérieure. Et si
les gays n’aiment pas cela, eh bien qu’ils se fassent hétéros ou qu’ils
deviennent comme dans « Rue de Babylone » criminels car ils seront
alors, s’ils ne sont pas déjà, des amants frustrés, des amoureux aliénés, des
humains insatisfaits. On donne à voir des gays aux bourgeois des théâtres en
sachant que pour eux ce n’est que de la taquinerie d’un soir et de l’autojustification
qu’ils sont bien mieux que ça.
Ils sortent tous et tout heureux car on les a titillés et
parce qu’ils retrouvent la normalité dans la rue.
Dommage car il y a avait bien mieux à faire sur ce sujet.
Dr Jacques COULARDEAU
# posted by Dr. Jacques COULARDEAU @ 2:00 PM