Saturday, August 31, 2013

 

To fight homophobia you must refuse provocation or compromission

THE MATTHEW SHEPARD STORY – 2002

This is a short film about a young man who was the victim of some homophobic hatred. No matter what the circumstances could have been, no matter what the condition, language or behavior everyone could have demonstrated, killing someone just because he is different is simply absurd. And I say any difference cannot justify killing him, her or them illegally or legally. All act of lethal violence against any one has no justification at all.

But in this film, in this case the emphasis is not so much set on the son who finds out he is gay in high school, probably when he went to his first homecoming dance with a girl he could not cope with, but about his parents who had accepted this fact, about the parents after his death, after the first part of the trial that convicted the killer, a young man like Matthew, of the crime, and before the second part of the trial when the jury is going to decide on the sentence. The death penalty is sure but a plea can always be accepted by the parents.


The question is what can the parents do? What would Matthew tell them to do? Will he require the death penalty or will he request mercy for his killer? If Matthew was a beautiful person;, an intelligent person, a gracious person, he must have known violence leads to violence and some one some time must stop the hate machine and say: “Okay, you killed me. Okay you meant to kill me and you abandoned me in a place where I took two days to bleed to death, to die, before my body was discovered. Okay you intended to kill and to torture. But you did all that from a crooked belief that people who are different have to be gotten rid of and that did not come from you, and anyway I cannot find closure and peace in your death. I can only find closure and peace in forgiving you and hoping you will forgive yourself.

I regret a little the father decided to follow another line in front of the court and to accept to show mercy and take the plea from the defense but for the wrong reason, so that the killer may suffer remembering his crime all along his long life. It does not even matter whether the murderer does or not. What matters is what the world can remember from Matthew, the message he can transmit to us from beyond his grave, from beyond his torturing chamber, from beyond the long agony and suffering ending in death. And that message has to be a message of mercy that may lead some people to realizing the way out in a divided situation is necessarily to come to terms with the difficulty and moving on towards more tolerance and more understanding.


But the message is for us today that we have to put that division, that antagonism behind us and move towards providing everyone in this global society of ours with the same rights and the same duties, no matter what their personal choices may be. But remember: we cannot respect something, a religion, a sexual orientation, a culture, an ethnic origin, or whatever you may think of, if we do not know about it, if it is kept and has to be kept locked up in a closet.

A very strong film on a situation that will little by little tend to move away and get lost behind us and bygones will have to be bygones. The day is close when this will happen, will be the case.


Dr Jacques COULARDEAU



Friday, August 30, 2013

 

Encore un effort pour rattraper notre retard

MUSÉE D’AQUITAINE – BORDEAUX [AU XVIIIe SIÈCLE] LE COMMERCE ATLANTIQUE ET L’ESCLAVAGE – 2010

Un très beau livre, bilingue par ailleurs, français-anglais, qui donne une vision globale de la croissance de Bordeaux au 18ème siècle après que Louis XIV ait définitivement pris le contrôle de la ville en neutralisant le fort du Ha et le Château Trompette, les deux citadelles fortifiées de la ville, et en construisant le Fort Médoc à Cussac, Médoc, et la citadelle de Blaye de l’autre côte de la Gironde pour bloquer toute remontée de bateau non autorisé : les bateaux anglais étaient principalement visés qui venaient se ravitailler en « claret » le vin non Appellation d’Origine Contrôlée, donc du vin ordinaire avant que le vignoble de qualité ne se développe justement après cette prise de contrôle. Vauban qui vient de construire les deux forts protecteur de la Gironde en profite pour consolider le Fort du Hâ et le Château Trompette qui protégeaient la ville depuis la bataille de Castillon de 1453, et donc d’en prendre le contrôle en même temps. Le Château Trompette sera finalement détruit en 1818 pour permettre l’aménagement de la Place des Quinconces avec la colonne des Girondins. Notons cependant que de grands travaux avaient été réalisés tout autour (Place de la Comédie, Grand Théâtre, Jardin Public et les Grandes avenues appelés cours, etc) du temps des intendants comme Tourny et que la colonne des Girondins et ses bassins et chevaux étaient supposés être dédiés à Louis XVI avant la Révolution Française, mais l’objectif changea en cours de route. Le Fort du Hâ quant à lui sera détruit en 1835. Il est dommage que ce  catalogue ne précise pas cela.


Les illustrations iconographiques de tous genres sont très belles et les commentaires souvent justes mais parfois imprécis sur le contexte. La place Ludovise n’a jamais été construite mais le plan général a été conservé. Bien que le pourtour ait été construit plus ouvert que prévu sous Louis XVI. Il eût été intéressant de dire que le Jardin Public a pris la place d’un vignoble appartenant à une veuve qui l’a vendu. Il eût aussi été intéressant de signaler que le quartier des Chartrons et autres quartiers marécageux furent aménagés avec la construction de quais surélevés et un système de drainage évacuant les eaux usés et de pluie vers la Garonne à l’est ou les Jalles à l’ouest et au nord. Mais l’intérieur du quartier est en dessous du niveau des quais et j’ai connu au moins un cas dans les années 1950 où la Garonne a inondé l’intérieur du quartier par la remontée des eaux d’une forte pluie ayant entrainé une crue éclair par les égouts. La Place Paul Doumer était sous les eaux. Les derniers quartiers inondés l’hiver lors des crues des rivières furent finalement drainés et remblayés uniquement dans les années 1960 avec la construction du quartier de la Cité du Parc. Les ingénieurs qui asséchèrent ces quartiers étaient Hollandais en ces temps lointains, ce qui est normal du fait de leur expertise en polders.


La façade du Quai des Chartrons date de Louis XVI pour la partie la plus au nord et il eut été intéressant de donner la structure d’une de ces maisons, comme le 95 par exemple. Au rez-de-chaussée à gauche d’immense entrepôts sans aucune lumière et une seule entrée massivement grillée. Il s’agissait d’une maison négrière et ce rez-de-chaussée était fait pour héberger des cargaisons d’esclaves qui faisaient éventuellement escale à Bordeaux avant de partir vers les îles. Les négociants avaient à droite un vaste magasin ouvert sur le quai, une arrière cours et au fond de la cour des entrepôts plus petits mais avec portes et fenêtres. Le premier étage était l’étage des bureaux et des salons commerciaux. Le deuxième étage étaient celui des appartements du négociant et le troisième étage était l’étage des serviteurs. La hiérarchisation sociale se faisait aussi par les escaliers.


Le grand escalier des bureaux, et appartements jusqu’au troisième étage et un escalier de service de la cour à la tour en quatrième niveau qui permettait d’accéder aux toits, bien que j’ai toujours connu cet escalier coupé entre le deuxième et le troisième étage. Cet escalier reliait les diverses cuisines ou salles d’eau des trois étages avec galerie de liaison entre cette cuisine et salle d’eau du deuxième étage et les appartements du négociant en arrière de la cour intérieure. La partie frontale en avant de la cour intérieure étaient quatre salons de réception, comme d’ailleurs en dessous au premier étage. Il eût surtout été intéressant de fouiller un peu plus sur ces entrepôts aveugles et leur utilisation pour escales négrières.


La partie concernant la traite et l’esclavage est elle aussi très forte. De même la partie sur Saint Domingue, principale colonie attachée à Bordeaux et l’Aquitaine. Cette île était le premier producteur mondial de sucre et faisait de Bordeaux le premier port de France. On peut imaginer l’impact négatif du blocus anglais sur le port de Bordeaux à la fin du siècle sous la Révolution. Cela devrait expliquer d’ailleurs, du moins en partie, la modération des Girondins par rapport aux Montagnards.


Mais c’est là que le catalogue a de très belles et explicites photographies mais que le corpus du texte est déphasé par rapport à la recherche mondiale et surtout américaine, j’entends des Amériques, sur le sujet. On ne donne que quelques images sur l’horreur de comment on fait d’un homme africain un esclave qui n’est qu’un animal de trait que l’on place dans les testaments en-dessous des chevaux et juste au-dessus des bœufs. On ne parle pas non plus de la durée de l’institution et surtout de la production de bébés esclaves par reproduction forcée d’une façon ou d’une autre. On évite aussi de parler du rôle de l’église catholique gallicane avant la révolution et on ne fait guère que signaler le Code Noir sans donner d’avantage de détails. Par contre on insiste sur les phénomène de résistance et d’émancipation, dépassant alors largement le XVIIIe siècle et remontant sans problème jusqu’à aujourd’hui.


On est alors incapable de vraiment expliquer la résistance dans toute son ampleur et surtout les conséquences extrêmement durables sur les descendants même un siècle et demi ou plus après l’abolition de l’esclavage, et la France ne fut pas la première à le faire de façon permanente et ne le fit qu’en 1848. Certes les USA suivirent et la Russie n’abolit le servage qu’après la France, mais on reste très rempli de pudeur et peu descriptif du vrai traitement des esclaves. On ne donne même pas les taux effroyables de mortalité pendant le passage de l’Afrique aux îles. La période d’acclimatisation n’est pas explicitement décrite : faire de ces esclaves après des mois de survie en mer de vulgaires bêtes de sommes et animaux de trait.


Encore une fois cela est la seule explication  à la survivance encore aujourd’hui du Syndrome de Stress Post Traumatique de l’esclavage et du traitement que l’on peut proposer. Ce n’est pas en proposant un lopin de terre agricole aux descendants des esclaves dans nos dernière colonies dites départements d’outre-mer, descendants pour la plupart urbanisés aujourd’hui, qu’on réparera des siècles de sévices esclavagistes suivis d’un siècle et demi au moins de sévices ségrégationnistes. La logique dans les Antilles est exactement la même qu’aux USA pour les Noirs descendants des esclaves victimes de l’esclavages et de ses suites de plus de quatre siècles et pour les Indiens victimes d’un génocide de plus de cinq siècles. Sur ces questions on est cosmétique. On, me dira que c’est un musée pour le grand public. Il n’est pas interdit d’avoir des salles pour les adultes dûment signalées et des aires et salles pour les enfants dûment animées et encadrées pendant que les parents visitent les salles classées moins de 18 ans.


C’est ce traitement cosmétique en définitive allant contre le sens et contre l’histoire qui fait que certains utilisent tout leur talent et toute leur imagination pour suivre ceux qui vont justement en rajouter, comme l’immense auteure Toni Morrison qui vit une véritable fixation sur la période de l’esclavage aux USA. Elle a raison sur le fond mais elle se concentre sur des cas si extrêmes que parfois on se demande si elle ne fantasme pas, et on sait qu’elle ne fantasme pas. Il faut bien voir que la fuite d’un esclave déclenchait immédiatement une chasse à l’homme avec chevaux et chiens, armes à feu et autres outils de torture qui remplaçaient avantageusement la chasse à courre après un renard ou un sanglier.


Natif de Bordeaux et fidèle à mes origines je crois que l’on peut faire beaucoup mieux que cela et qu’il serait temps de rattraper le retard que nous avons accumulé en France par rapport aux historiens, psychiatres et autres chercheur et praticiens noirs, latinos et indiens de l’entier des Amériques. Il serait bien d’ailleurs que l’on s’oriente vers l’indépendance de nos dernières colonies.

Dr Jacques COULARDEAU





Wednesday, August 28, 2013

 

Le retard nécessite un rattrapage urgent

JACQUES DE CAUNA – CECILE RÉVAUGER – LA SOCIÉTÉ DES EXPLOITATIONS ESCLAVAGISTES, CARAÎBES FRANCOPHONE, ANGLOPHONE, HISPANOPHONE, REGARDS CROISÉS

Le titre ne dit pas de quoi il s’agit. Il s’agit bien des plantations esclavagistes mais dans la dernière période de cet esclavagisme, quand il commence à se démailler, à la fin du 18ème siècle et au début du 19ème, grossomodo jusqu’à l’émancipation finale des esclaves en France en 1848. La logique de cette recherche est donc beaucoup plus le développement de l’émancipation des noirs que la description réelle de l’esclavage dans toutes ses dimensions. A partir de 1770 ou à peu près l’esclavage est condamné à court terme, sauf aux USA où il perdurera le plus longtemps et dans toutes sa brutale horreur. Certains diront même qu’il perdurera jusqu’en 1963, puis 1964 et 1965 sous des formes diverses d’apartheid. La question du pourquoi ce fut ainsi différent entre ici les Caraïbes et les USA, n’est pas posée.

Une deuxième remarque en passant seulement. Il y a parfois comme une tentative de refaire l’histoire, je me demande même s’il n’y a pas un peu de honte à décrire l’horreur. Mais cela empêche de voir l’essentiel : il ne saurait s’agir en rien de la même chose que la Shoah effectivement mis en parallèle, ni même d’une chose comparable parce que justement l’horreur du traitement de ces individus et infiniment plus grace et surtout le fait que l’esclave est esclave pour dix, vingt ou trente générations. L’enfantement à Auschwitz était exceptionnel. L’enfantement dans le cadre de l’esclave était une des dimensions économiques essentielles.


Cela a une autre conséquence. Eric Saunier, page 140, écrit : « … l’historiographie française de l’esclavage, laquelle est très en retard en comparaison de la situation dans laquelle se situe l’historiographie anglo-saxonne. » Si on ne part pas des conditions réelles de comment un esclave est fabriqué (dans la traversée de l’océan et dans la période d’acclimatation) par la main et le fouet humain à partir d’un être humain venu d’une autre culture dont on l’arrache et dont on lui interdit même de se souvenir, par la violence extrême selon les recettes d’un certain Willie Lynch, on ne comprend pas les effets à long terme, ce que les Anglo-saxons, ici un terme faux car il s’agit d’abord et avant tout des Noirs et des Indiens d’Amérique qui ne sont pas des Anglo-Saxons, sans compter les Latinos et autres Hispanos d’Amérique Latine qui eux non plus ne sont pas des Anglo-saxons, ce donc que les historiens américains appellent le « Post Traumatic Slave/Slavery Syndrome/Disorder » pour les descendants des esclaves noirs et son équivalent que je glose comme étant le « Post Traumatic Colonial Syndrome/Disorder » pour les Indiens, et l’on peut remplacer le terme Colonial par Extermination, Elimination, et tout autre terme de ce niveau. Une conséquence insidieuse est de gommer un tant soit peu, ne serait-ce que par pudeur, les sévices, tortures et autres traitements sadiques quotidiens auxquels étaient soumis les esclaves – et les Indiens – que pratiquement aucun SS d’Auschwitz sauf le docteur Mengele qui devait être un officier SS, aurait eu l’idée d’appliquer aux déportés. La Chienne de Buchenwald se faisait faire des lampes avec les peaux tatouées des prisonniers, mais elle ne les faisait peler qu’après qu’ils fussent mort. Les esclaves et les Indiens étaient pelés vivants et avec force sel si possible et par exemple à coups de fouet.


Il n’y a pas vraiment d’approche contrastive. Chacun est dans son domaine et ne compare pas avec les autres. Ils manquent alors tous une avancée fondamentale de l’historiographie américaine sur les sociétés esclavagistes : l’opposition radicale entre la théorie américaine (étatsunienne disent certains) de « l’unique goutte de sang noir » qui est sensé faire d’un homme un noir, opposé à la société à trois niveaux à laquelle il n’est fait qu’une seule allusion sans citer la référence nécessaire et sans employer le concept aujourd’hui standard grâce entre autres à Denise Oliver Velez, professeure à la State University of New York, le concept de « three-tiered society/system/color-class structure ». Ainsi on ne peut pas expliquer pourquoi ce dernier modèle s’applique aux iles caraïbes anglaises. On ne peut pas expliquer pourquoi la manumission est capitale pour ces sociétés en dehors des USA. Louis XVI envoya l’Amiral d’Estaing à la tête d’un contingent militaire pour aider les insurgés américains contre les Anglais, après que La Fayette ait fait la traversée avec un bateau d’armes fournies par le contrebandier Beaumarchais, surtout connu pour son théâtre et le droit d’auteur. Le château de Ravel en Auvergne, château de l’Amiral d’Estaing ne fut pas pillé à la révolution, et pour cause : il avait libéré ses serfs, annulé toutes les chartes et autres documents de servage et distribué ses terres. On pourrait aussi citer le cas de La Fayette et son château de Chavaniac La Fayette. Il n’en fut pas de même de nombreux autres châteaux en Auvergne. La manumission fut largement pratiquée pendant la Révolution Française, voire avant par de nombreux nobles en direction de leurs serfs, qui n’étaient qu’un cran au-dessus des esclaves : ils avaient droit à la justice.


Ainsi on ne comprend pas l’originalité des îles qui n’ont plus de population autochtone et applique le code noir qui pose la manumission comme un droit, y compris bien sûr en Louisiane, ce qui expliquera que la Louisiane rejoindra le camp fédéral dès 1862 pendant la Guerre Civile : la couche/classe intermédiaire des gens de couleur libres représentaient 47% de la population au début de cette guerre. Et ce fut un état capital pour la ratification du treizième amendement. L’auteur eût alors pu différencier les trois stratégies de colonisation et de montrer comment la stratégie française ne pouvait pas s’appliquer, faute de population autochtone, donc indienne.

Je voudrais ajouter quelques mots sur les onze articles.


Le premier article de François Hubert, Conservateur du Musée d’Aquitaine de Bordeaux, est une bonne présentation muséique de ce musée. On y apprend qu’il y a des salles sur la traite des noirs à Bordeaux et on peut alors découvrir qu’il y a un guide bilingue sur ces salles publié par le musée et en vente chez tous les libraires qui se respectent, comme Amazon.

Le deuxième article de Jacques de Cauna explique comment il a aidé en historien à reconstituer la maquette d’une plantation sucrière française de Saint Domingue. Intéressant aussi. Il y a quelques photos couleur de cette maquette au centre du livre.


Le troisième article de Karen Bourdier aborde une dimension essentielle de l’esclavage : les femmes étaient des machines à produire des bébés esclaves et leur utilisation sexuelle souvent brutale pouvait entrainer des lésions plus que gênantes comme la déchirure de la paroi entre l’ampoule anale et l’utérus avec des conséquences dramatiques et à terme mortelles. Les femmes noires étaient importées en premier lieu pour leur exploitation en tant que génitrices. Cette dimension commerciale explique pourquoi les esclavagistes peuvent même prendre un peu soin de cet investissement. Pour Willie Lynch, esclavagiste et planteur des Caraïbes anglaises, dans sa lettre de 1712 aux planteurs de Virginie, largement disponible sur papier depuis 1970 et sur l’Internet depuis l’invention de l’Internet, explique comment c’est le mâle qui doit être torturé à mort devant les femmes et les enfants pour bien former les enfants et pour amener la mère à protéger ses enfants de ce sort en les dressant à l’obéissance avec violence la plupart du temps. Tout cela échappe à Karen Bourdier.

Le quatrième article de François Poirier ne concerne qu’indirectement les Caraïbes par l’intermédiaire d’esclaves marrons déportés pour les éloigner des îles où ils font des ravages psychologiques et politiques.


Le cinquième article de Trevor Burnard concerne le prix des esclaves. Par prix n’est pas entendu la valeur, simplement la valeur d’échange sur un siècle ou à peu près de ces esclaves sur les marchés d’esclaves. Les chiffres sont froids et donc peu lisibles. Il aurait fallu les croiser sérieusement non pas uniquement avec le marché du sucre puisqu’il s’agit de la Jamaïque, mais bien plus avec la traite elle-même, la concurrence acerbe entre les divers fournisseurs, la conservation de cet investissement en le rentabilisant par l’exploitation de son travail, par l’exploitation de sa fertilité, par l’’exploitation de sa capacité à apprendre de nombreux métiers. Les esclaves marrons des USA furent d’un immense apport aux Indiens chez qui ils se réfugiaient du fait de ces arts et métiers qu’ils possédaient. Il eût été intéressant de montrer les relations entre ces qualifications acquises (investissement éducatif) et les moyens employés pour soumettre et exploiter ces noirs qualifiés, voire de croiser cela avec les fuites (marrons) et même la mortalité. Peut-être que c’est trop demander, mais il y a des moyens de trouver, j’en suis sûr, puisqu’on trouve aujourd’hui des données aux USA sur ces questions.

Cela aurait permis quelque chose d’essentiel : étudier la hiérarchisation des esclaves, la stratification des esclaves et sortir enfin de la simple opposition domestiques et esclaves des champs. A ce niveau le récent film « Django » est largement plus subtil.


Le sixième article de Pedro Welch approche de la « three-tiered society » de Denise Oliver Velez mais n’exploite pas les données qu’il avance. Il montre très bien comment la classe des esclaves est stratifiée à la Barbade entre les esclaves exploités directement pas les propriétaires et les esclaves qui ont la liberté de se louer au plus offrant et qui partagent les rentrées avec le propriétaire. De toute évidence ce sont des esclaves mais qui doivent payer une sorte de rente ou loyer à leur propriétaire pour pouvoir travailler pour qui veut bien les employer. Puis il y a la classe des gens de couleur libres et leur nombre augmente du fait de la manumission sous toutes ses formes : libération, rachat par l’esclave lui-même ou un intermédiaire qui ensuite libère l’esclave (cas des capitaines de vaisseaux marchands donné dans le livre), la libération  testamentaire éventuellement. Cette classe intermédiaire n’est pas étudiée suffisamment et on manque alors la dynamique forte qu’ils créent de par leur position sociale et économique puissante et incontournable pour les plantations. Et enfin tout en haut les Blancs qui sont tous libres bien sûr et dont une partie importante sont les colons, les planteurs , les marchands et négociants, les capitaines et officier de marine, les soldats, du moins les officiers et sous-officiers, et quelques autres professions valorisées comme docteur. Le rôle joué par la classe intermédiaire des gens de couleur libres et éventuellement des « self-hiring slaves » ou esclaves auto-loués qui peuvent s’allier avec les gens de couleur libres est non exploré. Ce n’est pas tant ce que pensent les individus qui est important dans une société mais le rôle social que chacun joue individuellement et collectivement.


Le septième article de Dominique Goncalvès concerne le débat pendant le boom sucrier de Cuba de la fin du 18ème et du début du 19ème siècle, plus ou moins déclenché par la révolution de Saint Domingue et la première abolition de l’esclavage. Les demandes des planteurs sont claires : 1- supprimer les fêtes religieuses ou jours fériés, tout en encadrant mieux l’emploi du temps des esclaves pour qu’ils puissent faire face à leurs tâches très physiquement pénibles ; 2- aménager sinon supprimer le jeûne ; 3- permettre les enterrements sur la plantation pour éviter les déplacements pénibles et les pertes de temps ; 4- permettre les messes sur les plantations pour les mêmes raisons. Il s’étonne que l’église résiste à ces demandes mais il n’explique pas comment ces pratiques ont été mises en place. Il faut remonter à la réforme religieuse du 9ème siècle qui instaure le dimanche chômé et les grandes fêtes religieuses obligatoires, environ 75 jours chômés dans l’année : puis à la réforme sociale du 10ème siècle qui instaure le féodalisme et assure la première révolution verte de l’Europe ; puis la révolution proto-industrielle du 12ème siècle qui est la première grande mécanisation de la vie humaine et qui permet avec les moulins et bien d’autres développements de compenser la perte de temps de travail des autres réformes. Il serait intéressant alors de voir comment l’église fait face à la révolution industrielle en train de commencer dans le monde, et les plantations esclavagistes ne sont que l’industrialisation de l’agriculture féodale européenne transportée dans les colonies. L’article en reste à une vision très conservatrice de l’église ou de la couronne espagnole ou du Pape, alors qu’il s’agit d’une position conservatoire en l’absence d’une compréhension de ce qui se transforme sous leurs yeux, comme le passage de l’esclavage au salariat par la manumission et par les esclaves auto-loués. L’église apparaît comme une démagogue qui protègerait le mode de vie des esclaves alors qu’elle protège la structure sociale qu’elle a mise en place à partir du 9ème siècle.


Parlant d’église catholique il serait intéressant de voir ce que cette église a fait dans les Caraïbes et si son travail fut comparable à celui de l’église catholique gallicane de la Louisiane française qui a commencé à systématiquement baptiser les enfants et marier les couples chrétiens quelle que soit leur composition dès les années 1720 : registres de baptême et de mariage en ligne depuis maintenant plusieurs années pour la Louisiane sous l’autorité de l’évêque de la Nouvelle Orléans.

Le huitième article d’Agnès Renault prend le cas particulier des plantations caféières de l’est de Cuba installée par les Français fuyant la révolution de Saint Domingue. Mais à partir du fait que l’on n’a pas expliqué l’extrême violence par laquelle on transformait un être humain en un animal domestique généralement listé entre les chevaux et les bœufs on ne comprend pas les phénomènes de résistance auxquels les planteurs doivent faire face. Citons en quelques unes : résistance dans la soumission physique (instinct de survie) ; résistance dans le dressage des enfants à la soumission (pour leur éviter de mourir ou souffrir) ; résistance dans la dé-émotionalisation des rapports humains en particulier entre les femmes et les hommes et encore plus entre le père et ses enfants, asse facile, et entre la mère et ses enfants, beaucoup plus difficile ; résistance par la nonchalance, malgré le fouet ; résistance dans la fuite (marron) ; résistance dans la manumission gagnée d’une façon ou d’une autre. La conclusion apparaît alors fondée sur peu de chose : « De fait les conditions d’affranchissement n’étaient pas très bonnes, dominées par les systèmes du rachat et les clauses testamentaires. D’autre part la croissance du marronnage, au rythme du développement des plantations de café, dans la région est un autre signe des mauvaises conditions serviles qui radicalisèrent les formes de résistance. » (page 95) On est à des lieues lumière des recherches américaines, au sens large des Amériques autant qu’au sens étroit des USA.


Le neuvième article d’Eric Saunier concerne la franc-maçonnerie et sur la base de faits précis couvrant les francs-maçons du Havre, de Bordeaux et de Nantes et l’auteur prouve que le mythe d’une franc-maçonnerie abolitionniste est erroné car dans les ports les loges contiennent une majorité de participants directs à la traite et à l’esclavage, sans compte que tous participent au commerce des biens coloniaux produits par les esclaves. Il va même jusqu’à clairement remettre en cause l’inspiration franc-maçonne de Victor Schoelcher et Joseph Napoléan Sarda-Garriga, les deux hommes politiques qui ont produit l’arrêté du 27 avril 1848 qui abolit l’esclavage.

Le dixième article concerne la franc-maçonnerie à La Barbade et Trinidad. Les loges sont uniquement composées d’hommes blancs et d’hommes « nés libres », ce qui exclut les gens de couleur libres. Les membres sont donc les planteurs, les négociants et marchands, les capitaines et marins, les officiers et soldats, donc tous des agents du colonialisme esclavagiste. Cela explique que l’implication des francs-maçons dans l’abolition de l’esclavage dans les colonies est totalement fictionnel et ne relève que d’individus blancs isolés. Il faudra attendre 1847 pour que le Grand Orient change sa constitution et remplace « hommes nés libres » par « hommes libres ». Les esclaves sont donc toujours exclus, bien que un an plus tard l’esclavage sera aboli, et il est bien évident qu’« homme » signifie bien « individu humain mâle ». Le rejet du racisme et du sexisme ne sont donc pas dans les principes fondamentaux de la franc-maçonnerie dans la période concernée, en France et ses colonies, jusqu’en 1847 pour le racisme et beaucoup plus tard pour les femmes.


Le onzième et dernier article de Jacques de Cauna concerne Etienne de Polvérel, l’un des deux commissaires de la Convention envoyé à Saint Domingue pour abolir l’esclavage. Polvérel est celui qui voit le plus loin, dans le sens d’un socialisme utopique, mais il est irréaliste. Sonthonax est celui qui a un peu ses épaules sous sa tête et il fera le coup de force et publiera le décret d’émancipation personnel avant que Polvérel soit prêt sur le sien. Comme dit Polvérel lui-même : « des évènements inattendus ont pressé la marche de mon collègue Sonthonax. Il a proclamé la liberté universelle dans le Nord ; et lui-même lorsqu’il l’a prononcée n’était pas libre. » La conclusion de l’auteur est donc juste quand il dit : « … le conflit qui oppose en 1793 les deux commissaires de la Révolution Française à Saint Domingue et dont Polvérel sort vaincu. » L’auteur donne un certain détail sur les propositions de l’un et de l’autre, imagine ce qu’aurait été l’histoire si Polvérel n’avais pas été vaincu, mais cela n’est pas du travail historique. On se demande alors comment page 173 l’auteur peut écrire : « Tout montre que c’est donc bien Polvérel qui doit être considéré comme le principal organisateur de la première abolition mondiale de l’esclavage colonial… » C’est là réécrire l’histoire, alors même que Polvérel a concédé sa défaite.

Un livre intéressant même si la numérotation des articles est erronée.


Dr Jacques COULARDEAU



Sunday, August 25, 2013

 

Le monde a changé et ce cri de colère est devenu mal orienté

ISMAËL AÏT DJAFER – COMPLAINTE DES MENDIANTS ARABES DE LA CASBAH ET DE LA PETITE YASMINA TUÉE PAR SON PÈRE – EDITIONS BOUCHENE – ÉCRIT 1951 – PREMIÈRE ÉDITION 1987 – © 2002

Une poésie du temps de la colonisation d’Alger à peine trois ans avant le début de la guerre de libération, six ans après la fin du fascisme et du nazisme.

L’idéologie coloniale est représentée dans ce long poème par la référence régulière et lourde à Charlemagne l’inventeur de l’école selon la légende française de la mythologie laïque et chaque fois ou presque ce Charlemagne ramène à la surface une chanson qu’on a appris à l’école :
Au clair de la lune,
Il était un petit navire,
Frère Jacques,
Il court il court le furet,
Une fleur au chapeau,
Sur le Pont d’Avignon,
et la dernière sifflée par les personnages
Un macchabée c’est bien triste.


Le poème est donc d’abord la dénonciation du colonialisme mental qui appelle a une « décolonialisation » mentale, culturelle et spirituelle également, et cela bien après la décolonisation de l’indépendance. Cela explique à la fois le fait que le poème n’a pas été publié quand les Français régnaient en maîtres en Algérie. Trop dangereux. Puis qu’il ait été publié en 1987 seulement, justement quand la décolonisation spirituelle est la revendication qui monte sept ans après la mort de Boumédienne quand l’Algérie hésite entre la tentation islamiste naissante (GIA, Groupe Islamique Armé) et la tentation de l’arabisation et de l’islamisation modérées. La suite fut sanglante. Mais que vise ce poème ?

Il parle du point de vue des mendiants d’Alger du temps de la colonisation et devient un cri de référence à la lutte des Algériens pour leur intégrité et donc une tentative de centrer le débat des années 1980 sur le problème de la pauvreté et du développement industriel et économique. Les repus coloniaux ont été remplacés avec l’argent du gaz naturel par les repus de l’indépendance. C’est donc une critique directe au régime du FLN, un régime qui a remplacé une domination par une autre avec la menace d’une islamisation islamiste possible qui serait une troisième étape de dépendance.


Mais la forme du poème est une sorte de « slam » construit sur la base d’invectives contre ceux qui dominent cette société. Les invectives sont directes, haineuses et répétitives. Et elles se centrent sur un événement, un fait divers particulièrement odieux. Un mendiant de 42 ans aidés dans son calvaire par sa fille Yasmina de 9 ans, par deux fois force sa fille sous les roues d’un camion.  Elle en meurt. Le poème est dédié à la mémoire de cette fillette. Cette poésie directe qui ne peut être que parlée car lue sous sa forme écrite elle apparaît extrême sinon extrémiste. Mais vue comme une invective incantatoire sur la tombe de la victime cela devient une bombe, un cri de colère, une cri de souffrance, une plainte d’horreur devant l’insouciance des gens repus, devant l’impunité des gens établis qui imposent à une frange sociale la misère de la mendicité.

On se demande alors pourquoi ce texte publié seulement en 1987 a conservé Charlemagne et les comptines françaises, car alors c’était plutôt la référence au Prophète et les versets du Coran que l’on apprenait à l’école en arabe justement coranique. Mais aujourd’hui ce texte est totalement déphasé car l’enjeu de la misère n’est plus celui des SDF mais bien plus largement la lutte des pays autrefois sous-développés pour leur propre émergence.


Dans ces pays ci-devant sous-développés la misère existe, ainsi que la mendicité, mais le jeu a totalement changé car cette mendicité, si elle est autorisée, se dirige vers les touristes étrangers et non vers les nantis nationaux. Et les pays ci-devant sous-développés suivent trois lignes dont une seule pourrait apparaître comme de la mendicité.

Ils exigent leur dû pour réparer les dommages du pillage et du colonialisme. Mais ile le font aujourd’hui au nom de l’humanisme et de la dignité et au niveau mondial : aide à l’enfance, aide à la culture et à l’éducation, aide à la santé, aide au développement, etc.


La deuxième ligne est celle de la lutte pour son propre développement. Une lutte qui a pris du temps pour démarrer mais qui depuis une vingtaine d’année se met sur les rails du succès. Mais pour cela il aura fallu qu’un changement radical se fasse au niveau mondial.

Il aura fallu que cinq siècles de colonialisme soient effacés par une dynamique de retour aux équilibres du monde d’avant ce grand changement qui eut lieu en Europe après le premier siècle de la Grande Peste Noire, après la Guerre de Cent Ans et quelques autres, après l’invention de l’imprimerie (d’ailleurs importée d’Asie) et le désir d’expansionnisme ne serait-ce que pour permettre aux soudards du féodalisme d’aller guerroyer loin de l’Europe.


Et ce retour aux dynamiques anciennes est symbolisé par l’émergence de la Chine, puis de l’Inde et le recentrage du monde entier sur l’Océan Indien et bientôt l’Atlantique sud.

Et ce n’est qu’un commencement. Et cela aujourd’hui rend ce poème plus qu’ambigu, gênant.

La citation de l’article de presse qui annonce le fait que le père a été sauvé de la peine de mort, la guillotine dûment mentionnée, car reconnu irresponsable par les experts psychiatriques semble aller dans le sens de la demande de la peine de mort contre ce père pourtant aussi victime que sa propre fille


« Avec le sang de ta fille
Tu as acheté
            Pour la vie
La soupe des accusés
            Et le pain des condamnés
Dans la prison chaude
De ta conscience
Etouffée
A présent que te voilà fou
Ils se sont chargés de ta lourde responsabilité
Mentale
Et ce n’est plus leur faute
Et ce n’est plus ta faute
Et ce n’est plus la faute de la petite Yasmina
Et ce n’est plus la faute
De cette formidable absurdité qui se
            Tord de rire !... »


Dommage encore car cela évacue le vrai problème du colonialisme mental qui aura pris environ soixante ans pour commencer à reculer dans les continents colonisés, sans parler du continent nord-américain ou même l’Europe (Irlande, Yougoslavie, Pays Basque, Corse, Républiques Baltes et quelques autres encore.


Dr Jacques COULARDEAU



Saturday, August 24, 2013

 

A totally dystopic utopia about democracy

WENTWORTH MILLER – DOMINIC PURCELL – AMAURY NOLASCO – WILIAM FICHTNER – ROBERT KNEPPER – PRISON BREAK – SARAH WAYNE CALLIES – PRISON BREAK – THE FOUR SEASONS + THE FINAL BREAK

This series is more than a series since the episodes are not in any way autonomous. They all follow one another, the seasons too, with only one story line from the beginning to the end. And you will definitely be moved to deep emotions by the last extra episode, the Final Break. And altogether it lasts some fifty-eight hours of intense breath-taking and disbelief suspending action. The very first lesson is that you must not fool with a civil engineer and attack his brother, even if this brother is not his real brother. It is all in the head and luckily it is, otherwise neither Michael nor Lincoln would have made it to the end of the first season since they had against them their own mother, a power-hungry anti-maternal harpy who is ready to have any of her sons killed or even to kill them herself, slowly if possible because she finds it funny to see them losing their last drops of blood.


But the film is not so much about breaking out of prison but breaking out of servitude and build up your freedom along with the freedom of the whole world. The prison or prisons is or are a metaphor, better a parable of our total enslavement to some kind of order that is far, far beyond our consciousness, not to speak of control. And this battle is triggered by one elder son, who is not a brain but is a brute, who is fooled into going out to kill someone but that is a framing operation and he does not kill, but is found guilty and sent to the electric chair in Chicago in the now famous prison of Fox River, the well named since we are going to discover a prison is nothing but a whole colony of hundreds of foxes, and no vixens at all. Except the doctor and the main nurse. Some of these prison officers are of course rotten and they sell; to influential prisoners the various services that they should control, like the appointment of the prisoners on the working details. Some can even be thieves and steal the property of the prisoners that is kept “safe” in some kind of closed cloakroom. Prison safety is not exactly safety for the prisoners and their property.


So the series describes all kinds of dependence and imprisonment. The first one is a prison universe with its warden, then its prison officers and various guards and its medical personnel. This is already a hierarchy that has its rules and its alienations. Then you have the prisoners and there too you have a hierarchy. The plain inmates, and then those who have the favor of being considered as able to work in the prison on various tasks for a real pittance, but for something. But the control of such positions is bought up by one prisoner, in our case a mafia higher-up, and he chooses who he wants to be the members of this team. There are also teams working in the kitchen and in the laundry and other general services of the prison. And next to this hierarchy you have another one that is racial, not so much a hierarchy than an apartheid system that cuts the population into the whites and the blacks, or at least the too big groups of people protected by the white and the black main inmates, self appointed of course, at least on the basis of their outside connections, I mean criminal connections. And then you have those who are not under protection on either side, the non-mentionable who can keep their heads low and remain unseen, and as long as they remain invisible they will have no problems.


The last thing to say about such a world, the prison world is that small criminals are of course mixed with major criminals and that is bad, very bad indeed. The small criminals will be afraid from the very start and they will accept some protection in exchange of some petty services. They become the petty slaves of these protectors and there you have the sexual perverts who only want some young flesh for their personal service. Then you have the real criminal minds who organize networks to control the prisoners, and even, when they can, the prison itself. A prison is a college, if not a university, post-graduate studies if you please, for criminals and that education is paid by the state free of charge, full board and pension included.

The prison SONA in Panama is not different from the Fox River Federal Prison in Chicago. All prisons are the same. It is their very nature, at least the very nature the series wants you to think of and ponder about. Of course there are different sides that are not shown: the fact that there is a library and that you can get some real education within the prison and also some prisoners lend their knowledge to the others and even do some research to know more and be more helpful to their fellow inmates.


The second level the series wants you to think about is justice, and there the picture is bleak indeed. If by any chance you do not have the best lawyer and the best defense funds for your first trial you can do and try what you want afterwards you will never get through and you might, today in some states only, escape the death penalty but be in prison for ever. Think of Mumia Abu Jamal, and he is not the only one. In the reverse case you can literally buy yourself the best just and equal justice you can if you can bring experts in and pay for DNA tests and so on. The police will not try to get to the bottom of a case if they have an easy solution on their platter. The police is the easiest institution to manipulate with the easiest people to influence you can imagine. They only run after real evidence in series and in very special cases. Everyone is not DSK with all the political leverage behind such a case. Then there is only one choice: to dream till you die, or to escape and run till you die.


But very fast the series gets what is at first an undertone to the level of the major plot. Our global world is under the menace of some “company” that is secret and possesses a tremendous amount of scientific knowledge that is both positive in the civilian field and deadly or lethal in its military applications. And there are in this world a lot of people who would like to control that technical and scientific knowledge to sell it to potential war-mongers or war-minded politicians or dictators to have some fun in this very dull world indeed. That’s always the basic debate with science. In hard science like mathematics and physics the constant choice is between military apps and civilian apps, and military apps are bringing in some profit a lot faster than civilian apps. But think of the medical field and the famous and frightening nanobots that will cost a fortune and that will give such an advantage in life span and physical or mental means to those who will have them in their blood and brain. They will not forget that these nanobots can communicate within each individual, but, and they will forget this, also within a certain spatial area (like GPSs and smart phones) and particularly to the main motherboard controlled by a few people, I mean very few people, like the six card holders of the “company” in this series. Those who will have the nanobots in their blood and brain will become the real aristocracy of the world and take the control of the planet and the cosmos but will be controlled by half a dozen people at an even higher level. And this totalitarian ideology is coming under the disguise of an MIT professor. Never mind which one. There will always be a mad scientist to plan such projects.


But do not think humanities are not concerned. They are working a lot today on human sciences like sociology, psychology, even psychiatry to find the proper genetic ways to control the DNA of people, to change it if necessary, and also to control the minds and the behaviors of people with plain old manipulation, brain washing and other hypnotic techniques. Any totalitarian leader or party will find the way to mesmerize people, to control people with propaganda or with some drugs or products including in your food or drinks. Think how easily they make you addicted to caffeine, to energetic drinks, cola drinks or alcohol, not to speak of tobacco. They are ready to use any ideology to achieve their objectives and particularly religious ideologies and absolutely no religion is immune because the basic objective of a religion is to bring people together and make them think and feel and respond to the world collectively along one single line. God made you free to choose the truth and in all religions there is only one God’s truth.

The series thus becomes political science fiction at first and then plain science fiction after the political intrigue is pushed aside with the resignation of the Vice President who had become President with some poisonous drink enhancement for the elected President and who was behind the framing of Lincoln Burrows, as a faithful beneficiary of the “company”. This science fiction is of course nothing but science fiction and in that case it is not a utopia at all, but a real full and absolute dystopia, at least till the last episode and the Final Break.


The last and essential dimension of this series is a study in loyalty, not allegiance which is not always rational, but loyalty. There are three types of loyalties. First the loyalty to the “company” and this one is nearly easy to counter: let them shoot the first bullet and then shoot them all down. And if you can capture one or two try to get into some exchange of arguments, even striking arguments if necessary, to make them change allegiances and then loyalties. But then you have the official services that are supposed to enforce the law, security services and justice. Both are supposed to develop a rational loyalty to the country, the fatherland, the motherland, the constitution, or whatever charter or declaration of universal human and civil rights. But how can you recognize at the bottom of the institution or outside that the order given to you is respectful of such principles, and such orders can come from a long may up the ladder of authority and if my boss tells me something he must have his good reasons to do so, and I have to obey, don’t I? And then think within the frame of local police, state police, FBI, Homeland Security, Secret Services, Presidential Security and many others and you have the full picture. Think within the frame of elected officials of the police, justice, judicial administration, justice department, etc. Good luck at surviving in that maze.

But the main loyalty is the loyalty you owe to those who have helped you in a difficult situation, those who have been your associates in some ethical project, even if it is to escape from a prison. And this loyalty is of course all the more powerful if we are speaking family. This started in 2005 like Supernatural and in both cases you have two brothers, the elder one less brainy, the younger one brainier, with a mother that disappeared in their young age. They are not real brothers, be it only because they family names are not the same, but they were raised together and after the disappearance of their mother, and later father, the elder one takes care of the younger one and even puts him through college and university to the level of engineer. But his means were not always very swift and they were often criminal. Those two brothers who are not brothers and yet are brothers have no mother till very late in the series and the mother is such a caricature that they can only deny her motherhood that she refuses anyway and what’s more they do not have no father any more, though he makes a quick come back to disappear by falling on a bullet. The two series are so similar along that family line that there must have been some leak from the one to the other. But Prison Break is one story line and one plot, not episodes that have little to do with one another and a rather loose general line. Of course Prison Break has to come to an end, whereas Supernatural can last forever. The two brothers are Michael and Lincoln, just like the two brothers in Supernatural are supposed to be the vessels of archangel Michael and Lucifer. The parallel between Lincoln and Lucifer is of course hilarious but not gratuitous. Lincoln the liberator of the Blacks, Lucifer the liberator of the Apocalypse, of the human species once and for all, or till the next whimsical caprice of God who could recreate his imperfect creation a second time in a few eons.


And the last episode is discreet about the death of Michael with one blood drop and a few light headaches, and then we skip four years and discover his son and Sara his wife but no father coming on his tomb with Alex, Sucre and Lincoln for some anniversary in some Central American country. The Final Break episode explains what happened and that episode is so phenomenally emotional with the post-mortem video message from Michael explaining why is not here any more. Absolutely beautiful. But also very Christian. The liberty of all and the punishment of the real criminal minds can only come through the sacrifice of one member of the team and the flight as fast and as far as possible of the only one that is menaced still, Sara, the Mary Magdalene of this modern Christ. Michael Scofield, MS in civil engineering, has to be sacrificed with his superior knowledge and intelligence. We will regret that in the final episode Lincoln’s son is not brought back on his uncle’s tomb with the rest of the family that includes Alex and Sucre who are not really members of the family.

A brilliant experience.


Jacques COULARDEAU



Saturday, August 10, 2013

 

Tonto Meets Lone Ranger in Texas.

WALT DISNEY – JOHNNY DEPP – THE LONE RANGER – 2013

LA ROUTE A ÉTÉ LONGUE. Walt Disney vient d’oser de toucher à un  classique populaire et ancien dans le domaine de la culture western et indienne, et le chemin parcouru depuis les Pocahontas des années 1990 à la gloire du colonialisme à l’américaine est important et remarquable.

Le film montre on ne peut mieux ce que la conquête de l’ouest a été après la Guerre Civile. Une course effrénée au profit par tous les moyens. Les compagnies de chemin de fer furent les premières à comprendre qu’investir c’est garantir l’avenir, leur avenir. Certains bien sûr pensaient au pays, à l’humanité, au progrès et au bonheur mais c’était des idéalistes qui ne sortaient pas de leurs bureaux.

La réalité était toute autre. Les travailleurs étaient pour une bonne partie des Chinois et ils étaient exploités comme des bêtes, une sorte d’esclavage industriel sans le nom. On ne mourrait pas par la volonté du patron. On mourrait pas accident, du genre « Est malencontreusement et maladroitement tombé sur une balle folle. »


Les Indiens étaient dans le chemin et bloquaient le « progrès » alors on les exterminait, on les affamait en exterminant les bisons, on les repoussait et on les cantonnait dans des réserves indignes de la simple survie humaine. Et on utilisait tous ceux qui voulaient jouer au plus fort et commander des semi-esclaves par la force, la violence et la mort, donc y compris de purs et simples criminels.

Ajoutez à cela les ressources naturelles qui appelaient la convoitise, à l’époque et au Texas l’argent, entendez bien le métal argent. Pour quelques tonnes d’argent certains étaient prêts à tout, absolument tout, en particulier provoquer les Indiens, ici les Comanches, utiliser des bandes de hors-la-loi déguisés en indiens pour attaquer des fermiers et provoquer une guerre, un massacre par la cavalerie toujours prête à quelque exploit quand ce n’est pas trop difficile, flèche contre mitraillette ou qui sait quelle autre arme à feu à répétition.

Le film montre très clairement ces dessous criminels de cette conquête de l’ouest mais montre aussi qu’il y avait des gens, des juges, des rangers ou autres shérifs qui n’acceptaient pas cela et qui se battaient pour la dignité et la justice, y compris d’ailleurs des Indiens. Le mythe du Lone Ranger a commencé dans cette idée que la conquête de l’ouest se fit avec beaucoup de sang innocent versé de façon aveugle mais qu’il y avait partout des gens prêts à se battre pour une certaine humanité, y compris d’ailleurs des femmes, et mieux encore des enfants.


Ce film montre donc en termes clairs ces enjeux et avec un traitement fait pour le public jeune et enfant de l’été aux USA, un traitement de qualité dans ce domaine qui ne lésine pas sur la durée et les effets spéciaux pour que jamais on n’ait à suspendre son incrédulité trop longtemps et sans que l’ont puisse se laisser emporter dans l’ennui par des longueurs, car il n’y en a pratiquement pas.

Walt Disney représente bien l’évolution actuelle dans le domaine de la résurgence et la décolonisation mentale des Indiens d’Amérique. Et ce mouvement commença en 1969 pour les Indiens eux-mêmes à Alcatraz mais beaucoup plus tard pour les Américains blancs. Cela n’efface pas les millions de morts inutiles, mais cela permet à l’histoire de se corriger sinon de se refaire.

Dr Jacques COULARDEAU



An important et essential film on the Conquest of the West and the Indians in Texas after the Civil War et around the transcontinental railroads. The Indians finally get a fair image in this film. They are no longer the wild people, sorry animals that were depicted for so long. In fact this un acceptable image is completely put upside down and thus the truth is recaptured.

The truth is that some people were ready to make a profit, and even a fortune, by all means available. There were some idealists in DC offices that were speaking of progress, humanity, good and happiness for people, etc. But in the field that was a completely different picture. Some who had power were ready to exploit workers building the railroads, essentially Chinese, as if they were slaves without the “title.” In real life people were not shot dead when resisting, they were the victims of sorry accidents and a silver dollar was given to the widows.

These people who had power in the railroad companies, and other industries, were ready to use all those who could impose work for a pittance with violence, brutal violence if necessary, guns and gunshots, if not manipulated and rigged accidents. Who was going to ask questions about dead Chinese?


The Indians were in the way. So they were exterminated with the cavalry if necessary who always shot first and asked questions from the Whites about the Indians second. Or they were starved to death by the extermination of all buffaloes by people like Buffalo Bill. Or they were pushed away and locked up in reservations. All kinds of treacherous actions were possible including using outlaws disguised as Indians to attack some farmers and start a war.

Add to the phenomenal profits that were to come from the railroads the fact that they found some natural resources that were worth fortunes, in this case silver and you have the magic potion that can turn the most honest and law-abiding clerk into the most aggressive criminal.


But the film is also clear about the fact that all people were not like that and there were some who did believe in progress, humanity and the “government of the people for the people by the people” and were able to resist the hooligans who were at the head of such industrial ventures, including some women and some children, on both sides actually.

When you remember the Pocahontas films who defended a myth of colonial history in Virginia, you can measure the distance that has been run by Walt Disney with this film that is honest and presented in such a way, with such special effects and with no lackluster scene or slowing down so that the interest is constantly at its maximum. Hence the film is perfect for a young audience in the summer that wants entertainment, and yet educational too.  The decolonialization, or mental decolonization, of Indians in the USA is now well on the road to success. And it all started in Alcatraz in 1969. We may not be able to redo history, but we are able to correct it.


Dr Jacques COULARDEAU



Friday, August 09, 2013

 

Edmond Rostand se fait beaucoup plaisir, et ce n'est pas pour déplaire

PHILIPPE BULINGE – EDMOND ROSTAND – FAUST DE GOETHE – EDITIONS THÉÂTRALES – 2007

La pièce a une histoire plus que mouvementée et n’a été découverte que par accident au début de ce siècle 90 ans après son écriture et 80 après la mort de son auteur. Le texte a été reconstitué par Philippe Bulinge à partir de quatre sources : deux manuscrits de 108 et 34 feuillets respectivement et deux tapuscrits utilisés en complément, l’un de 141 pages attribué à Rosemonde Gérard, l’épouse d’Edmond Rostand, et l’autre de 138 pages réalisé par François Rostand, le petit fils d’Edmond Rostand.

Le travail de Philippe Bulinge est très précis et même pointilleux au niveau des reconstitutions, de l’origine des éléments rajoutés au texte de base et des variantes possibles. Philippe Bulinge était un chercheur universitaire à Lyon et a consacré l’essentiel de sa recherche à Edmond Rostand. Aujourd’hui il dirige la compagnie Intersignes qui associe danse et théâtre pour un nombre réduit de danseurs et/ou acteurs (de un à trois) mais dont le travail corporel et vocal est amplifié par un travail visuel sur un ou plusieurs écrans et avec des voix off pré-enregistrées. En 2013 il crée une adaptation de ce Faust avec cette compagnie et il la joue d’emblée en tournée dans des châteaux de plusieurs départements du Centre, d’Auvergne, d’Aquitaine, de Bourgogne, de Franche-Comté et de Rhône Alpes pendant l’été. Je ne parlerai pas ici de ce spectacle mais uniquement de la pièce, du texte. Pour tout renseignement sur la compagnie et la pièce contactez [compagnie-interlignes.com].


Il s’agit donc de la « traduction » du Faust Première Partie de Goethe. Les guillemets s’imposent car même si Edmond Rostand garde la ligne générale de la pièce de Goethe, il introduit des changements importants. Il s’agit beaucoup plus d’une adaptation que d’une traduction. Par exemple il introduit cinq actes alors que l’original est simplement divisé en tableaux. Cette volonté d’avoir cinq actes pour faire classique est un peu superficielle et artificielle puisque les actes font respectivement 40, 14, 12, 11 et 19 pages. De plus il ne garde que le second prologue e-t supprime le premier. On peut alors se demander si cette pièce est vraiment achevée.

Le texte présente un Faust totalement désabusé qui n’a obtenu aucune réponse à aucune question, qui n’a découvert aucune vérité sur aucun point. L’action se pose après le premier siècle de la Peste Noire, donc au milieu du 14ème siècle quand l’imprimerie donne un coup de fouet au développement des universités, ou juste avant car l’hécatombe de la Peste Noire qui fait baisser la population de l’Europe  d’au moins un tiers en un siècle (1350-1450) exige un flot important de jeunes gens dans les centres de formation pour remplacer tous les officiels de l’état, les fonctionnaires (avant le terme) qui sont morts. On notera que cette invention de Gutenberg et Fust aura un succès immédiat car toutes les institutions auront intérêt à l’utiliser, que ce soit l’église catholique pour collecter des fonds en vendant des documents garantissant le rachat d’années de purgatoire, que ce soit la Réforme protestante de Luther qui ne peut commencer qu’avec le premier livre sorti de ces presses, la Bible de Gutenberg (1450-1455), que ce soit les états qui peuvent aisément faire circuler des ordres, des décrets, des arrêtés et des lois, sans compter les documents administratifs, et bien sûr la formation de leurs cadres dans les universités.


On a prétendu à l’époque que ce Faust était en fait une représentation de Gutenberg ou Fust accusés d’être les agents du diable. Certains ont même prétendu que l’Eglise Catholique était ainsi derrière cette histoire originellement en allemand. Comme dans la pièce il est fait mention du rôle joué par le père de Faust et lui-même pendant la Peste Noire, l’action ne peut être que située dans la deuxième moitié du 15ème siècle et comme il n’est fait aucune mention des Protestants et de la Réforme la datation du 16ème siècle pour le Docteur Faust n’est pas réaliste. On considère aujourd’hui qu’il y a eu un vrai Docteur Faustus qui serait mort en 1540 (archives universitaires obligent), mais la légende le pousse un demi-siècle au moins en arrière, sinon plus car il n’est fait aucune mention de l’imprimerie qui commença à révolutionner l’université  avec la Bible de Gutenberg (1450-1455).

Le meilleur résumé de cette problématique est donné par Lizzie Davis sur le site de Cambridge Authors, lié à la Cambridge University à l’adresse suivante : http://www.english.cam.ac.uk/cambridgeauthors/marlowe-sources-of-doctor-faustus.

« Modern yet medieval, contentious yet conservative, tragic hero or tyrannical villain: both play and protagonist of Christopher Marlowe's infamous Doctor Faustus present the audience with a maze of contradictions which have divided critics since its first performance. The Dr Faustus we encounter in Marlowe's play is a Renaissance scholar with the ambition of Icarus ('His waxen wings did mount above his reach'). The plot itself, however, is not Marlowe's own: the story existed in a German work, the Faustbuch from 1587; Marlowe's play has been called 'a dramatization' of this tradition. In taking a German story and using it as material for an English play, Marlowe transposed the legend into a startlingly different context with the result that this famous play posed some awkward questions to contemporary audiences, as it still does for modern audiences today.
« The Real Dr Faustus
« Though long a point of contention with historians, the existence of a real Dr Faustus is now accepted as fact. Having died around 1540 in Germany, the real Dr Faustus is recorded in contemporary sources (such as University records, letters and diaries) as being well-travelled and knowledgeable: some sources even report that he referred to the Devil as his 'Schwager', meaning 'crony'. Though sources differ on various points, contemporary writers are at pains to mention Faust's evil reputation: for example, in a note written by a junior mayor of Ingolstadt instructing that city officials 'deny free passage to the great nigromancer and sodomite Doctor Faustus'. According to Wikipedia (we haven't been able to check this, though) the original letter is held by the Ingolstadt city archive and it is dated 27 June 1528.»

Désolé pour l’anglais.


Ce point au moins clarifié, mais non résolu, nous pouvons regarder la pièce d’Edmond Rostand. Elle garde la trame générale de celle de Goethe. Le Docteur Faust accepte de signer un pacte avec le diable, Méphistophélès qui a obtenu l’autorisation de Dieu : il s’agit d’un pari du diable qu’il peut totalement pervertir le Docteur Faust alors que Dieu pense que cela est impossible. Ici le diable réussit pleinement et il arrive à gagner Faust par la simple concupiscence sexuelle d’un intellectuel non marié vieilli et même rassis et il tombe par simple fantasme jouissif bien sûr sans retenue, bien qu’il soit vrai que les protections en ce temps là étaient rares et que l’on ne pouvait que sortir non couvert. Marguerite, 14 ans, tombera évidemment enceinte. Mais Faust a utilisé une potion dormitive pour endormir Marthe, la mère, pendant qu’il visite Marguerite, la fille. Il pousse un peu la dose et la mère en meurt. Marguerite déshonorée donne naissance à un fils, à peine mentionné ici, et Faust dans un duel diabolique tue le frère Valentin de Marguerite venu protéger sa sœur. Marguerite est arrêtée et va être exécutée quand Faust l’apprend et revient nuitamment juste avant l’exécution pour la libérer avec l’aide de Méphistophélès. Elle refuse et semble dans cette dernière scène totalement incohérente.

La Damnation  de Faust de Berlioz avait mis l’accent sur la mort de la mère et la fille était poursuivie pour matricide. Le Faust de Gounod avait lourdement mis l’accent sur le meurtre de l’enfant par Marguerite, donc l’infanticide. La pièce de Goethe est tout à fait ambiguë sur ces morts. La première version que Marguerite donne dans son délire c’est qu’on vient de lui enlever l’enfant avant l’exécution, d’où un fantasme de mort. La deuxième version qu’elle donne, toujours dans son délire c’est qu’elle a noyé l’enfant. La troisième version qu’elle donne dans ses instructions pour les enterrements, sa mère d’abord, son frère ensuite, elle dans un coin et son fils sur son sein droit. La quatrième version qu’elle donne dans la fin incohérente, mis à part qu’elle mérite de mourir, c’est le conseil donné à Faust d’aller sauver l’enfant qui n’est pas encore mort, qui bouge encore.


Mais Edmond Rostand penche la balance dans un seul sens. Il garde la première version d’une Marguerite qui délire complètement. Il supprime la deuxième version et donc son assertion qu’elle a tué l’enfant. Il conserve la troisième et les instructions pour les funérailles. Enfin il conserve la quatrième et le conseil d’aller sauver l’enfant vu comme encore vivant et lourdement dramatisé comme tel par Edmond Rostand avec deux triples répétitions :

« Vite ! Vite !
Sauve ton pauvre enfant ! Cours et te précipite !
. . . [Ça n’est pas mort ! ça n’est pas mort ! ça n’est pas mort !]
Ça veut se soutenir, et ça gigote encore.
Sauve-le ! Sauve-le ! Mais sauve-le, te dis-je ! »

On notera l’emphase du (ici) troisième vers à la structure romantique fondée sur une triple répétition : quatre, quatre, quatre, puis deux vers plus loin la seconde répétition triple mais cette fois dans une structure d’alexandrin déséquilibré : trois, trois, un trois deux (rime féminine).


Il est clair que pour Edmond Rostand la balance de la justice penche vers le délire, le retrait de l’enfant et le fantasme de sa mort, ce qui alors renforce la fin :

« Méphisto : Elle est jugée !
Voix d’en-haut : Elle est sauvée !
Méphisto à Faust : [Allons ! suis-moi.] »

Les trois répliques ne font qu’un seul vers à la structure romantique, quatre, quatre, quatre. Mais Edmond Rostand a enlevé les deux anges qui sont venus sauver Marguerite du supplice final et son appel « Heinrich ! Heinrich ! » vient comme la voix de Dieu, de l’intérieur mais en élévation en forme d’écho (cathédralisation comme nous disons dans l’industrie du son). La didascalie de Edmond Rostand est moins claire que celle de Goethe : « de l’intérieur, s’affaiblissant » contre « de l’intérieur, s’affaiblissant en écho » (tradutcion de Jean Malaplate) et l’original «  von innen verhollend ». Edmond Rostand a supprimé le salut chrétien et donc l’absolution pour Marguerite. Il ne garde qu’une version qui insiste sur le phantasme de la mort de l’enfant et sur un salut purement éthique et non chrétien, en tout cas beaucoup moins chértien.


Il ne me reste plus qu’une remarque à faire sur le style. Edmond Rostand varie énormément les mètres de ses vers, beaucoup plus que Goethe, mais surtout, et cela est surprenant, une proportion importante de ses rimes sont de mauvaises rimes françaises (en fait uniquement la voyelle et la consonne finales au lieu de la consonne puis la voyelle puis la consonne finale de la syllabe finale) mais sont de bonnes rimes germaniques. Il est impossible de dire si c’est un signe de négligence, une faiblesse ou une volonté de germaniser son style. On peut se demander pourquoi alors il n’a pas systématiquement employé des rimes germaniques sui interdisent l’identité de la dernière syllabe, en fait de la dernière syllabe accentuée, donc du dernier pied et exige que la première consonne de ce dernier pied soit différente d’une rime sur l’autre. Si je me trompe corrigez-moi.

Il faut aussi signaler comment Edmond Rostand raccourcit certaines scènes ou répliques et parfois en allonge d’autres. Dans la le Sonde de la Nuit de Walpurgis il supprime de nombreuses choses mais allonge une des répliques de Puck, le personnage de Shakespeare du Songe d’une Nuit d’Été d’une strophe de quatre vers à trois strophes de quatre vers.

« Voyez leur balourdise extrême :
On dirait des éléphanteaux.
Aujourd’hui le roi des lourdauds
N’est-ce plus le gros Puck lui-même. » (traduction de Jean Malaplate)


« Nous exaltons, triomphants,
L’idéal bleuâtre.
Assez de ces éléphants
Sur notre théâtre.

Effaroucheurs de rayons,
Fuyez, misérables !
Et nous, de grâce, soyons
Presqu’impondérables !

Soyons si légers ce soir,
Que Puck, qu’un rien fane,
Que Puck, impossible à voir,
Soit moins diaphane ! » (Edmond Rostand)

On ne peut pas vraiment dire si cela joute quelque chose au style concis et dense de Goethe qui pose que Puck serait un gros alors qu’Edmond Rostand pose lui que Puck doit être aussi léger que possible. Il développe sa vision de Puck alors que Goethe n’avait conservé de lui qu’un trait surprenant en forme polémique.

Ce texte d’Edmond Rostand est donc un nouvel éclairage sur l’auteur de Cyrano de Bergerac.

Dr Jacques COULARDEAU





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